Il y a quinze ans, le général commandant la Légion étrangère réunissait les meilleurs légionnaires athlètes autour d’un noyau dur formé par l’équipe de cross du 2e Étranger. L’Athleg, contraction des termes légionnaire et athlète, était née et caractérisait alors le nouvel état d’un groupe de volontaires, crossmen de haut niveau.
Aujourd'hui encore, rien ne les différencie de leurs camarades, si ce n’est l'exécution d’une mission supplémentaire : l'excellence physique, sans cesse démontrée et sur un autre terrain.
Affectés à la CAPLE (compagnie administrative du personnel de la Légion étrangère, une des unités du 1er Régiment étranger, à Aubagne), ils vivent un itinéraire à la Légion identique à celui de tout légionnaire : instruction, entraînement, projection, services, examens et stages de qualifi cation. Sélectionnés parmi les meilleurs, ils forment une équipe de dix-huit athlètes d’une demi-douzaine de nationalités différentes dont les domaines de prédilection sont les cross et courses sur route, les épreuves de dix kilomètres, le
semi-marathon et le marathon, et enfi n l’Ekiden*.
Spécialistes d'une discipline exigeante, les légionnaires athlètes incarnent des valeurs qui, si elles sont naturellement celles que l'on prête volontiers aux sportifs de très haut niveau, n'en demeurent pas moins foncièrement et typiquement légionnaires : le culte du travail bien fait, de l'effort et du dépassement, la prédominance de l'esprit d’équipe, le respect de l’autre et de l’adversaire, la solidarité.
Caractéristique "maison" d’importance, la priorité accordée à l’effet de masse sur la réussite unique et personnelle transcende l’état d’esprit des coureurs de l’Athleg. Leur action "au combat" sur piste n’est pas l’acte d’un sportif isolé. Au sein de l’équipe, c’est la renommée d’abord, le résultat collectif qui prime sur la performance physique individuelle. La dynamique initiale est fondée sur une addition de personnalités aux grandes aptitudes sportives, où l’individu lui-même reste d’ailleurs plus important que son résultat, parce que c’est bien de la réussite commune obtenue qu’on veut voir émerger un champion. Sans l’équipe, pas d'athlète... Le coureur existe grâce, pour et par l’équipe, comme son homologue combattant vit pour son groupe, sa section, son unité. Dans les deux cas, sur les capacités de chacun repose l’accomplissement de la mission, de leur énergie particulière relève le "coup de rein" décisif, celui qui favorise ou assure la victoire. L’esprit guerrier de l’athlète, l’image d’une volonté tendue vers l’atteinte d’un objectif commun illustre, là encore, une autre facette de l’état d’esprit légionnaire.
Et de guerrier, il en est justement question à l’Athleg !
Sans esprit combattif, comment expliquer que Fouad Larhiouch termine 1er des Français à Birmingham (championnats du monde de semi-marathon en 2009) ? Comment caractériser ce qui anime Ruben Iidongo, légionnaire naturalisé Français d’origine namibienne, qui se classe 1er des Européens en Chine (Nanning, octobre 2010, dans la même discipline) si ça n'est l'esprit guerrier ? Comment se fait-il, enfin, que Rachid Ghanmouni accède au titre de champion de France de marathon (au rang de 4e international au Nice-Cannes, en novembre dernier) s'il n’a, chevillée au corps, la rage de vaincre, lui qui était, il y a
encore peu, coiffeur régimentaire au quartier Viénot ?
Probablement parce que les légionnaires athlètes sont désormais indissociables du "label" dont ils représentent indirectement un vecteur de recrutement et, plus directement, un outil de communication exceptionnel. Réellement surtout parce que l’image qu’ils renvoient démontre que là où les mène leur engagement physique se trouve l’essentiel, bien plus important que la victoire sur les autres : le dépassement de soi comme seule victoire qui vaille sur les épreuves d’une vie d’homme.
Et ça, c'est aussi typiquement légionnaire...
Bonne lecture à tous,
*Relais de six coureurs sur la distance d’un marathon, en trois distances (successivement 5 Km, 10 Km, 5 Km, 10 Km, 5 Km et 7,195 Km).